Garder le contrôle des semences

Haïti

De plus en plus dépendant des importations alimentaires, Haïti ne couvre plus aujourd’hui que 40% de ses besoins. Cette perte de souveraineté a débuté dans les années 80, et les produits locaux sont aujourd’hui « oubliés » par la jeunesse haïtienne.

Dans ce contexte, AVSF soutient depuis de nombreuses années un partenaire très influent en Haïti, le MPP – le Mouvement Paysan de Papaye, dans la région du haut plateau central. Fondé le 20 mars 1979, le MPP est une organisation paysanne rassemblant paysans et jeunes travailleurs ruraux, avec laquelle AVSF travaille depuis plusieurs années sur un projet d’insertion des jeunes ruraux et de formations en agroécologie.

Une « invasion » de 400 tonnes

Après le tremblement de terre du 12 Janvier 2010, Monsanto avait offert 400 tonnes de semences de maïs au gouvernement haïtien. Le MPP s’était alors mobilisé pour sensibiliser la société civile au risque de ces semences transgéniques ou hybrides : une fois introduites sur le territoire haïtien, ces semences menaçaient d’éliminer les variétés locales, cultivées depuis plus de deux siècles et avec elles – l’agriculture paysanne toute entière.

Le 5 juin 2010, une grande manifestation organisée par le MPP mobilisait plus de 20 000 personnes, pour dénoncer le projet « Winner » financé par USAID (une initiative de l’agence publique américaine d’aide au développement) qui distribuait les semences Monsanto. Résultat : projet et distributions furent stoppés.

Semences hybrides = dépendance

Les semences hybrides –hormis leurs avantages indéniables et leur innocuité pour la santé – ont pour les agriculteurs un inconvénient majeur : elles doivent être rachetées chaque année. Elles engendrent ainsi une formidable dépendance dont souffrent déjà aujourd’hui de nombreux pays africains et sud-américains.

Dans les pays occidentaux, l’investissement en semences hybrides est minime. Par contre, dans les pays en voie de développement, c’est un achat si coûteux qu’il interdit presque toute reconquête de souveraineté alimentaire.

Le marché mondial des semences – évalué à 30 milliards de dollars par an – est presque intégralement contrôlé par 10 multinationales dont Monsanto, Syngenta, Cargill et Limagrain. Et il est choquant de voir transformer en marchandise un patrimoine naturel commun, dont la gestion devrait appartenir à ceux qui produisent les aliments pour nourrir la planète – les paysans.